#13 Le rôle (neurobiologique) vital de la tendresse
“Vivre sans tendresse, on ne le pourrait pas” chantait Bourvil dans son titre La Tendresse en 1963. Cette affirmation est vraie sur un plan affectif évidemment mais aussi neurobiologique !
La tendresse c’est quoi au juste?
La tendresse est un sentiment et une attitude marqués par une affection douce, bienveillante et pleine de soin, exprimée physiquement ou verbalement, par des gestes (câlins, caresses…) ou des paroles (mots tendres, encouragements…). Elle se manifeste par une chaleur émotionnelle qui ne cherche pas à s’imposer mais à rassurer, à apaiser et à créer un lien intime, délicat et réconfortant. Elle est liée à un sentiment d’amour, d’amitié ou de compassion, et apporte un bien-être à la personne qui la reçoit et à celle qui l’offre. La tendresse peut être ressentie et donnée dans diverses relations humaines (parents-enfants, couples, amis), mais aussi envers les animaux ou des objets de valeur sentimentale (doudou, peluche, bijoux…). Elle est précieuse dans la mesure où elle nourrit les liens affectifs et leur donne une profondeur humaine et chaleureuse.
La tendresse est vitale
L’absence de tendresse fait des dégâts irréversibles
La chanson de Bourvil est douce, mélancolique. Mais l’absence de tendresse est un vrai drame et peut créer un trauma relationnel important.
Tragiquement, on sait d’ailleurs exactement ce qu’elle provoque quand l’absence en est totale. En effet, suite à la politique nataliste imposée en Roumanie par son dictateur Ceaușescu dans les années 60, des centaines de milliers d’enfants se sont vus entassés dans des orphelinats surpeuplés. Ils étaient dépourvus de tout et évidemment d’attention et de tendresse. 5 minutes de présence (in)humaine tout au plus, mécanique. Les âmes accrochées pourront si elles le souhaitent consulter les images des terribles effets que ce traitement barbare a pu provoquer chez ces enfants… ou écouter (peut être est ce plus supportable?) l’émission de France culture, État de faits, les orphelins roumains. “La plupart [des enfants] souffrent d’hospitalisme, se balancent violemment sans discontinuer, terrifiés par le moindre contact corporel, tous accusent un retard de croissance [et de développement] considérable, corps désarticulés et visages de vieillards. Cris de bêtes, rires fous, disent seuls l’indicible.” (Les enfants des pouponnières roumaines et la question traumatique, S Bydlowski)
Dès la naissance, un enfant a besoin d’attentions, de contact et de tendresse, pas seulement d’information à traiter, de stimulations ou d’être nourri. Les expériences (qui seraient aujourd’hui interdites) de Harlow avec les petits singes privés du contact de leur mère l’ont montré pour la première fois.
On considère qu’une absence de lien, de tendresse avant 20 mois créent des dommages irréversibles et irréparables sur le cerveau.
Le manque de tendresse
Fort heureusement, le plus souvent, ce genre d’extrémités n’est pas atteint. L’absence n’est pas totale. Elle est “partielle”. Et cela correspond plutôt à un manque ou à de la négligence plus ou moins accentués. Sans conduire à l’hospitalisme, l’un ou l’autre aussi peuvent avoir des effets importants dans la vie de l’adulte: un rejet du contact corporel pour un manque de tendresse physique manifesté pendant l’enfance ou un rejet des compliments, des encouragements et des manifestations verbales de l’amour pour un manque ou une négligence de manifestations verbales.
Le traumatisme est une expérience (ce qui se passe en nous) et non un évènement (ce qui nous arrive)
En effet, notre système nerveux se développe avec les expériences saillantes (les plus fréquentes) qu’il a vécues. Si généralement, nous n’avons pas reçu de mots tendres ou de paroles encourageantes, nous verrons le monde avec ces lunettes. Si généralement, nous n’avons pas reçu de gestes tendres, nous vivrons le monde avec cet imperméable là.
Notre cerveau étant par nature prédictif, il n’attendra rien d’autre quand bien même ce besoin de tendresse et plus largement de contact et de lien est vital pour chacun.e d’entre nous, et ce afin de croire dans notre propre valeur, de croire (et même vivre) que nous avons une place dans le monde et de nourrir notre besoin fondamental d’être vu, reconnu.
S’ouvrir au lien et à la tendresse
Ainsi, une personne qui voudrait rentrer en contact avec soi (par exemple affectivement) ou qui donne un compliment pourrait être perçue comme dangereuse, ou fausse. Peut-être l’est-elle vraiment ! ou… peut être simplement, l’adulte qui a souffert de ce manque n’est pas capable de le recevoir car c’est étranger à son monde.
Alors il/elle doit être accompagné.e doucement, régulièrement et (!) en sécurité pour accepter de changer de lunettes ou retirer son imperméable. Cela peut se faire avec son conjoint.e ou ses ami.e.s ou, évidemment, en thérapie. Il.elle fera petit à petit l’expérience d’un nouveau monde, plus doux, plus délicat et plus en lien dans lequel la tendresse est possible, acceptable et véritable car vivre sans, Bourvil a raison, “Non non non non, on ne le pourrait pas”.
Une remarque? Une critique? Une contribution ? N’hésitez pas à vous exprimer ci-dessous en commentaires ! Au plaisir de vous lire !
Vous souhaitez commencer ou reprendre une psychothérapie avec un professionnel qualifié, contactez-moi.
Recevoir les derniers articles
Vous souhaitez lire mes prochaines publications ?