#11 La méthode Coué ne suffit pas! – Théorie polyvagale
La méthode Coué suggère qu’ il est possible d’influencer favorablement notre inconscient par la suggestion, et de cette façon d’améliorer notre état tant physique que moral. Qui ne l’a jamais essayé ?
Mais… qui a trouvé que ça fonctionnait tout le temps?
Je prends peu de risques avec ces questions rhétoriques. Être tout le temps dans la négativité ou le ruminement n’a jamais aidé personne. C’est clair. Mais la méthode Coué a, nous l’avons tous expérimenté, ses limites. C’est frustrant mais, sans savoir pourquoi, parfois, elle ne fonctionne pas. Eh bien… en fait… c’est normal. La théorie polyvagale (TPV) nous le justifie.
Introduction à la théorie polyvagale
La théorie polyvagale (TPV) est très riche. Elle mêle neurophysiologie, psychologie, psychiatrie, médecine. C’est un travail scientifique dont on perçoit maintenant la valeur et son influence dans les sciences sociales comme la psychologie. Le modèle psychothérapeutique Intelligence Relationnelle la porte au cœur. C’est en cela notamment que l’IR est un modèle holistique, psychocorporel et neurobiologique.
La théorie polyvagale fait et explique le lien entre notre physiologie (notre corps et notre physique) et nos états mentaux et comportementaux (émotions, pensées, capacité attentionnelle, croyances). Au lieu d’expliquer nos actions par notre cognition (ce qu’on pense), Porgès montre que notre comportement est moins déterminé par cette dernière que par notre état physiologique. Et spécifiquement Porgès les explique par l’état d’activation de notre système nerveux autonome, celui-ci étant très lié au niveau de sécurité ressenti en soi et que notre physiologie va détecter.
Son auteur, Stephen Porges donc, psychologue et docteur en psychophysiologie, l’a établie en cherchant des explications à des phénomènes observés en néonatalogie. Deborah Dana a ensuite été pionnière dans la vulgarisation et l’incorporation de ces enseignements dans la psychothérapie.
Notre état de sécurité intérieur (physiologie) influence notre état de pensées (psychologie).
Notre état de sécurité intérieur va être déterminant dans notre perception du monde, dans notre perception des autres et de nous même et donc dans notre mise en relation avec notre environnement en général (société, travail, amical, amoureux). Cela va également avoir une influence sur ce qu’on va ressentir et notre façon d’agir. Cela va ainsi être déterminant dans notre santé, notre bien être psychique et physique.
Les principes que propose Porges sont novateurs car jusqu’à présent, l’ordre “descendant” était figé pour expliquer puis résoudre nos problèmes psy. En effet, la vision proposée par la psychologie ou la psychanalyse, jusqu’ici, s’inscrivait dans: ‘nos pensées, nos croyances, notre façon de voir le monde ont une influence sur notre manière d’agir ou notre état émotionnel’.
La TPV ne le nie pas. Mais ! Elle ajoute un point essentiel:
La manière dont on ressent de la sécurité au présent a un impact sur la façon dont on perçoit le monde, dont on agit, sur ce qu’on ressent. Sans qu’on en ait conscience, notre corps “choisit pour nous”, surtout (!) dans les situations dans lesquelles on manque de sécurité. C’est un “mode par défaut”, un mode physiologique automatique qui est en place. Voilà: le “nerf de la guerre” c’est la perception de sécurité de notre physiologie, de notre système nerveux.
Avec cette théorie, nous disposons ainsi de clés de compréhension et au delà! des clés de soins grâce aux modèles thérapeutiques qui l’intègrent:
– sur certains de nos comportements qu’on se voit faire sans comprendre la manière dont on réagit,
-sur notre figement dans certaines situations alors que dans notre tête on sait exactement ce qu’il faut faire,
-sur nos comportements addictifs qu’on sait mauvais pour soi et qu’on continue pourtant.
-sur toutes ces actions “cycliques”, ces patterns, ces conduites persistantes, en étant totalement spectateur de notre comportement
Les pensées seules ne gouvernent pas notre état de santé mental.
Une (r)évolution de la psychothérapie
La TPV s’éloigne donc des théories analytiques ou des explications par les processus de pensées (ordre descendant). Elle ajoute une explication “montante”, venant de notre ressenti de sécurité, automatique. Porgès ne se limite pas à la proposition de cette hypothèse. Il l’explique sa théorie neurobiologiquement par les fonctions du nerf vague (d’où le “vagal” dans le nom de la théorie). Je vous renvoie sur ses publications (sous cet article) pour plus de détails.
Un détail qui n’en est pas un: la perception de sécurité, c’est très différent de la sécurité réelle existante. Pourquoi? Parce que la perception est subjective. Pour une même situation, les mêmes faits, une personne A pourra se sentir en sécurité alors qu’une personne B non. La sécurité (absence de danger) peut être réelle mais B ne le ressent pas ainsi.
C’est cela qu’on travaille, analyse ou plutôt experimente ensemble en cabinet: le décalage potentiel (et j’insiste sur potentiel) entre notre perception de sécurité d’une situation comparée à la réalité de cette sécurité ou à une perception tierce. Cela ne paraît pas si délicat écrit comme cela mais pourtant c’est très très profond, fin et subtil. C’est à approcher avec beaucoup de précautions car la perception de sécurité raconte souvent notre histoire (pendant l’enfance notamment) et ce qu’on ressent au présent. Et l’accueil de ce décalage potentiel n’est pas l’objet de la TPV donc j’utilise d’autres voies. J’écrirai certainement d’autres articles pour préciser cela aussi.
Quoiqu’il en soit, c’est ainsi qu’on parvient petit à petit à ralentir voire supprimer les automatismes ou les fonctionnements qui nous handicapent dans notre vie. Ils ont eu un rôle fort utile qu’on saura reconnaître et même… honorer! Néanmoins, avec une approche thérapeutique adaptée, le.a patient.e pourra les abandonner, ne plus être spectateur.ice de ses comportements et (re)trouver le meilleur de lui/elle-même.
Sources
FR: W. Porges, S. (2021). La théorie polyvagale: Fondements neurophysiologiques des émotions, de l’attachement, de la communication et de l’autorégulation. Allemagne: EDP sciences.
EN: Porges, S. W. (2011). The Polyvagal Theory: Neurophysiological Foundations of Emotions, Attachment, Communication, and Self-regulation (Norton Series on Interpersonal Neurobiology). États-Unis: W. W. Norton.
Aller plus loin…
Ma page ressources utiles
Un article avec 3 vidéos de l’institut français d’EMDR
Une vidéo d’introduction par Gile factory
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